Dans cet extrait du bulletin 23, Ghislain Verral nous fait découvrir l'histoire d'un jeune foyen dont la courage amena la ville de Saïgon à lui rendre hommage, Gustave Jouhaneau-Larégnère
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Située à Hô Chi Minh-Ville, la rue Trương Định honore une figure de la résistance annamite à la colonisation française au XIXe siècle. Mais avant cela, quand la plus grande ville et poumon économique du Viêt Nam communiste était la capitale de l’Indochine française, cette rue honorait la mémoire d’un autre héros, un jeune officier de Marine né sur les rives de la Dordogne et mort sur les bords de la rivière de Saïgon : Gustave Jouhaneau-Larégnère (1832-1861)
La seconde moitié du XIXe siècle voit une formidable expansion territoriale des puissances européennes en outre-mer. L’Afrique, l’Asie et le Pacifique sont d’immenses territoires où la Grande-Bretagne, la France, les Pays-Bas et d’autres pays européens entendent s’établir pour en tirer des richesses et vendre leurs productions manufacturières. Parmi ces territoires, la péninsule indochinoise. À la croisée de civilisations millénaires, ces terres extrême-orientales font rêver le Vieux Continent ,idéalement situées entre la Chine et le Japon, d’une part, et les Indes, d’autre part, la France entend s’y implanter pour profiter de ses innombrables richesses et pour contrebalancer la main mise britannique sur les Indes, tout en espérant contrôler cette zone commerciale très importante entre la mer de Chine et l’océan indien. La colonisation de ce qu’on appellera plus tard « la perle de l’Empire » va sceller le destin d’un enfant de Sainte-Foy-la-Grande.
Éléonor Étienne Jouhaneau-Larégnère, dit Gustave[1], naît à Sainte-Foy le 18 novembre 1832 dans une famille de la haute bourgeoisie protestante aquitaine.
Par son père, il descend d’une famille de notables (juristes, négociants, notaires, propriétaires terriens), dont le nom de « Larégnère » est celui d’une de leurs propriétés, située à Loubès-Bernac (Lot-et-Garonne), non loin de Sainte-Foy. Quelques décennies avant la naissance de Gustave, deux de ses parents se sont fait remarquer au moment des guerres révolutionnaires et durant les décennies qui suivirent. Son grand-oncle, Pierre Jouhaneau-Larégnère (1771-1838) qui fut un valeureux soldat des armées révolutionnaire, blessé lourdement, devenu un élu local influent dans le premier tiers du XIXe siècle. Et son grand-père, Mathieu-Éléonor Jouhaneau-Larégnère (1767-1863) qui fut un temps engagé volontaire aux côtés de son frère cadet, avant de devenir le secrétaire de Pierre-Anselme Garrau (1762-1829), député montagnard et représentant révolutionnaire en missions en Italie et en Espagne.
Au XIXe siècle, Mathieu-Éléonor Jouhaneau-Larégnère est un notable influent, il exerce les fonctions de maire de Pineuilh (Gironde) de 1814 à 1852 et celles de conseiller général de la Gironde de 1833 à 1842 - un temps pressenti pour la députation -, en plus de ses activités dans les œuvres protestantes locales.
Côté maternel, Gustave Jouhaneau-Larégnère descend de la noblesse d’épée et protestante agenaise, apparentée aux armateurs et négociants des Chartrons et aux planteurs antillais. Son grand-père, Étienne Brion Chopin de La Bruyère (1748-1807) fut capitaine des mousquetaires du Roi sous l’Ancien Régime puis général de brigade dans l’armée du Rhin, pendant la Révolution. Arrêté pendant la Terreur, il échappe à la guillotine mais ne réintègre pas l’état-major, se consacrant alors à sa propriété de Laparade (Lot-et-Garonne).
[1] Nous retiendrons ce prénom « de famille » retenu par les archives militaires et l’historiographie coloniale françaises.
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